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Rainbowcinema ou le septième art et l'homosexualité
Rainbowcinema ou le septième art et l'homosexualité
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7 août 2006

8 FEMMES

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affiche_huit_femmes3Un an après Sous le Sable, François Ozon a encore conquis les spectateurs et la critique avec 8 Femmes, film librement adapté d'une pièce de Robert Thomas et exclusivement interprété par la gent féminine.

Dans les années cinquante, à la veille de Noël, un drame éclate dans une maison bourgeoise coupée du monde par la neige : Marcel, le maître céans des lieux, a été découvert mort, poignardé dans le dos. Un climat de suspicion envahit alors la demeure où sont réunies huit femmes, toutes liées à Marcel et parmi lesquelles se trouve la coupable...


Un film hybride à l'image de la diversité féminine
 
Le film de François Ozon présente un panthéon de femmes diaboliques, fallacieuses et vénales. Les personnages pourraient bien avoir quelque parenté avec les tueuses bibliques les plus illustres telles que Dalila, Jézabel ou encore Hérodias. Rien  d'étonnant à ce que Marcel ait sombré dans une profonde prostration en compagnie de cette terrible engeance féminine. De la plus jeune à la plus âgée, toutes sont dévorées par une perversité qui atteint des sommets hors pair.8_femmes_suzon3

Casting exceptionnel pour 8 Femmes de François Ozon. A l'affiche se trouve un florilège de comédiennes françaises : Fanny Ardant, Emmanuel Béart, Danielle Darrieux, Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Virginie Ledoyen, Firmine Richard et Ludivine Sagnier. Toutes se donnent la réplique dans un film inspiré de Women de George Cukor. Les personnages s'agitent au cours d'une intrigue similaire à celle des Dix petits Nègres d'Agatha Christie ou dans la version chic d'un cluedo. Un meurtre, des mobiles, des révélations en cascade et huit femmes, toutes susceptibles d'être coupables. Le suspense est alléchant dans un film où les arts se croisent en permanence. Tour à tour, les actrices interprètent une chanson accompagnée d'une chorégraphie dévoilant leur personnalité. Musique, danse, comédie policière, drame y sont habilement 8_femmes_chanel4entremêlés et suggèrent une certaine hybridité traduisant le caractère insaisissable de la femme. Qu'elle soit maternelle, enfant, séductrice, féline, rebelle ou acariâtre, celle-ci y est incarnée à tous les âges par des ambassadrices de charme. Sa diversité transparaît dès le générique d'ouverture où se succède une série de fleurs représentant les personnages. Elle est également reflétée par les costumes des actrices et le décor de la maison, lesquels confèrent à 8 Femmes un aspect bigarré. Les personnages, très différents les uns des autres, expriment sans conteste la multiplicité de la femme mais tous se ressemblent : le caractère démoniaque s'avère leur dénominateur commun.affiche_huit_femmes_81 


Le panthéon des femmes diaboliques      

Faisons honneur à la jeunesse et commençons par Catherine, la petite dernière. Fraîcheur et candeur semblent ressortir de son visage mais son oeil brille d'espièglerie et de méchanceté. C'est donc ironiquement qu'elle porte le doux prénom de Catherine qui signifie pure. Son aînée Suzon s'affiche comme une jeune fille pleine de bonnes manières mais elle cache un lourd secret derrière sa tenue rose bonbon. Gaby, leur mère, est loin d'être le parangon de l'épouse fidèle tandis que leur tante Augustine vit dans une indigence affective et passe son temps à cracher son flot de sarcasmes sur la famille. Malgré son âge avancé, la grand-mère de Catherine et de Suzon se montre complètement étrangère à la sagesse et préfère endosser le rôle ridicule d'un personnage moliéresque (Harpagon dans L'Avare). La soeur de Marcel, Pierrette, ne rehausse en rien ce monde féminin ; elle côtoie le vice en promenant sans pudeur ses plus beaux atours dans les cabarets et dans la rue. Attardons-nous à présent sur les servantes. Dévouée et attentionnée, Chanel est appréciée pour ses services mais une ombre vient ternir ce portrait élogieux. Louise, la femme de chambre récemment engagée, honore très bien sa profession mais elle va bien au-delà de sa tâche, consciente des effets foudroyants que produit sa tenue ancillaire...huit_femmes_e._beart

Un univers féminin, triomphe de la beauté et de la volupté   
                     
             
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L'homme est peu présent dans 8 Femmes. Marcel, unique personnage masculin brille par son absence. Tout au long du film, il demeure enfermé dans sa chambre. son portrait n'est guère flatteur. Trahi et exploité, il n'est q'un loser pour Augustine, une vache à lait aux yeux de Pierrette. C'est donc la prééminence d'un univers féminin que le film fait émerger dans une demeure apparentée dès lors à un gynécée. Les actrices baignent certes dans une atmosphère caractérisée par une pugnacité et une pléthore d'invectives mais la grâce et la volupté parviennent à affleurer pour être mises à l'honneur. La danse en est la plus belle expression. Omniprésente dans le film, elle n'est pas sans rappeler une certaine danse macabre où la Mort se met en scène et tournoie avant d'accomplir ses funestes desseins. Costumes élégants, galbes séduisants, glamour et prestance illustrent à merveille la beauté et la volupté. Ces dernières émergent lors d'une scène où les joutes verbales et les coups de pieds s'éclipsent pour laisser place à des caresses saphiques où les mains féminines rompent enfin avec la violence pour épouser la réconciliation. Et lors du dénouement, les propos acerbes s'amenuisent pour laisser place à un chant final aragonien, triste et apaisant. Ainsi, si les femmes pataugent dans les enfers, il n'en demeure pas moins qu'elles dardent de splendeur.

Huit femmes et autant d'outrages à la vertu... La probité n'est pas l'apanage des personnages du film mais la pléiade des actrices françaises fait de ce dernier un joyau diamantifère où la dureté a triomphé de la pureté en laissant toutefois une place à la fragilité. Au final, une huitième merveille du monde.   

Sortie : février 2002
D'après la pièce de Robert Thomas
Distribution : Fanny Ardant, Emmanuel Béart, Danielle Darrieux, Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Virginie Ledoyen, Firmine Richard et Ludivine Sagnier
Réalisation : François Ozon
Scénario : François Ozon et Marina de Van
Photographie : Jeanne Lapoirie
Production : Fidélité Productions / France 2 Cinéma / Mars Films
Genre : Drame policier
Durée : 103 minutes

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