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Rainbowcinema ou le septième art et l'homosexualité
Rainbowcinema ou le septième art et l'homosexualité
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6 août 2006

MULHOLLAND DRIVE

cinq

mulholland_driveEn plein milieu de la nuit, une limousine arpente les hauteurs de la cité des Anges. A l'intérieur : deux messieurs et une femme fatale à la chevelure brune et au regard ravageur (Laura Elena Harring). Le voyage semble s'achever prématurément pour la belle, dans la ligne de mire d'une arme à feu quand soudain, une voiture percute de plein fouet la limousine. L'accident fortuit tue les deux hommes mais sauve la femme. Egarée, celle-ci  parvient finalement à trouver refuge à l'intérieur d'une maison nantie, laquelle a été préparée pour accueillir Betty (Naomi Watts), jeune actrice venue s'inscrire dans le sillage des plus grandes étoiles hollywoodiennes. Celle-ci aidera son hôtesse au regard désorienté à combler les vides de sa mémoire, causés par l'accident.      

Hollywood, patrie du dollar et des stars        mulholland_drive_betty

Très suggestif, le titre annonce un voyage dans l'univers hollywoodien, lieu mythique du cinéma par excellence. Strass, paillettes et glamour sont au menu du long métrage lynchéen. Le nom d'Hollywood suffit pleinement à faire rêver, éblouir et fantasmer. Comme il est beau de se laisser hypnotiser par cette myriade d'étoiles concentrées en cet endroit qui, au début du siècle précédent ne fut qu'un modeste village abritant une centaine d'âmes. Le sourire béat et figé, les compagnons de voyage de Betty expriment tout ce que véhicule l'usine à rêves la plus célèbre au monde. Idem pour la jeune actrice fraîchement arrivée et dont les valises sont pleines à craquer de candeur, d'espoir et de rêves de gloire. Le prénom d'adoption de Camilla, emprunté à Rita Hayworth, évoque aussi la fameuse sphère de l'industrie cinématographique.

Mais les fastes hollywoodiens ne constituent qu'une façade. Adam Kesher, réalisateur incarné par Justin Theroux, en a bien conscience car monsieur le cinéaste est sommé de ranger son avis au placard à propos du choix de la distribution de son propre film. Ainsi, si les constellations étincellent surperbement, c'est pour mieux camoufler le mépris de la création et du génie artistiques. Derrière le décor en carton-pâte se cachent de viles altercations et estocades en tout genre. Hollywood est certes une usine à rêves mais elle est avant tout une usine.

De l'autre côté du miroir      

De même que tout ce qui brille n'est pas or, tout ce que l'on voit n'est pas réel. Lynch n'a de cesse de le suggérer à travers son thriller fantastique en jouant avec virtuosité sur la mise en abyme du cinéma. Ce dernier n'est que trompe-l'oeil, imposture et prestidigitation. Trois p'tits tours de passe-passe, des décors plus vrais que vrais, des musiques en play-back, des perruques... Silencio! Que le spectacle commence! L'univers factice et insaisissable du septième art transparaît via l'aspect dédaléen du film. Envoûtant, ce dernier semble drapé d'un voile de mystère qui, jamais, ne devient diaphane. Le long métrage constitue un labyrinthe dont l'issue nous échappe mais c'est d'une main de maître qu'il a été conçu : le désordre y est subtilement organisé.

Lynch met également en exergue le caractère évanescent des êtres à travers son film construit en deux parties, lesquelles présentent les personnages féminins sous leur double aspect. Candeur et innocence s'affichent sur le visage de Betty mais jalousie et noirceur ne demeurent jamais très loin. L'interprétation par Naomi Watts du rôle de Diana, femme tombée dans la déchéance, en est une parfaite illustration.

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Et l'on se laisse attendrir et duper par le regard hagard et éperdu de Rita alias Camilla, beauté aussi ténébreuse que venimeuse. Mulholland Drive souligne le caractère fluctuant des êtres qui toujours nous échappe. mulholland_drive_baiser1

      


The L Hollywood

Mulholland Drive met également en scène une histoire d’amour entre Betty, la jeune actrice accorte et Rita, la beauté amnésique. Qu’en est-il de cette relation ? Sert-elle à illustrer le narcissisme des actrices ? mulholland_drive_rita_et_betty6Sans doute. Toujours est-il qu’elle accentue la dimension ensorcelante du thriller fantastique de Lynch. Dans l’univers hollywoodien gangrené par le profit, les regards des deux parangons de beauté se croisent, les mains s’effleurent et les corps se rencontrent dans une lumière feutrée, à l’image du film mi-opaque, mi-limpide. 

mulholland_drive_regards1Bien qu’il ait démontré l'aspect factice du spectacle en démontant les rouages de ce dernier, la magie et l'intérêt n'en sont pas pour autant déflorés. Le réalisateur parvient à nous charmer avec son film énigmatique et sensuel grâce à la présence de Naomi Watts et de Laura Elena Harring. Les deux actrices créent une atmosphère capiteuse à travers leur relation saphique, majestueusement filmée. Le réalisateur a été auréolé du Prix de la Mise en Scène lors de la 54 ème édition du Festival de Cannes. L’on peut également lui rendre hommage précisément pour avoir réalisé une scène d’amour homosexuelle d’une élégance et d’un érotisme mémorables.


Sortie : novembre 2001
Distribution : Laura Elena Harring, Naomi Watts, Ann Miller, Justin Theroux, Michael J. Anderson, Robert Forster
Réalisation : David Lynch
Scénario : David Lynch
Photographie : Peter Deming
Musique : Angelo Badalamenti
Production : David Lynch
Genre : Drame
Durée : 146 minutes

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